Vous avez dit autonomie?
La proposition du ministre des Outre-Mer de soulager la crise qui secoue les Antilles françaises par l’attribution d’un surcroît d‘autonomie mérite quelques observations. On ne s’étonnera pas en premier lieu qu’une certaine presse et certains partis (RN mais aussi LR) aient une fois de plus fait l’amalgame entre autonomie et indépendance et crié à l’abandon de ces territoires. Nous avons l’habitude d’un tel amalgame en Alsace où l’idée d’autonomie est encore davantage diabolisée que partout ailleurs. Il faut aussi noter que la Martinique et la Guadeloupe relèvent déjà du statut de l’article 73 de la Constitution, à savoir d’un niveau d’autonomie, du moins sur le papier, auquel on n’ose pas rêver en Alsace, puisque les lois et règlements peuvent y faire l’objet d’adaptations tenant aux caractéristiques et contraintes particulières de ces collectivités, lesquelles peuvent même être habilitées à fixer elles-mêmes les règles applicables sur leur territoire, dans certaines matières. Avec un tel texte nous pourrions faire vivre le droit local! Il est vrai cependant que ces dispositions, qui sont largement inemployées, n’ont pas réussi à desserrer le carcan centraliste. De façon générale, les pouvoirs donnés aux collectivités locales, là-bas comme chez nous, ne touchent pas au cœur du pouvoir qui reste entre les mains des services de l’état. La question de l’autonomie reste posée, les déclarations ministérielles en constituent l’aveu. En Alsace aussi, cette question reste ouverte ainsi que le démontre le récent sondage IFOP selon lequel 75% des Alsaciens souhaitent que la Collectivité européenne d’Alsace bénéficie du transfert de la gestion de l’enseignement de la langue et de la culture régionales. Mais une des façons de dévaloriser cette idée d’autonomie est de lui demander de résoudre des problèmes auxquels elle ne peut rien toute seule, tels la pandémie ou le sous-développement. Toutefois, si elle ne peut pas résoudre des crises profondes, elle peut contribuer à les éviter car ces crises sont souvent dues, tel le refus du vaccin, à une défiance à l’égard du système étatique. Pour rétablir la confiance et la participation, il faut que les citoyens se réapproprient les institutions. L’autonomie, c’est cela.
Jean-Marie Woehrling
