Des crèches vivantes dans « la capitale de Noël » ?
L’Edito de ce numéro du Land un Sproch 221 nous rappelle à quel point l’histoire de la Nativité est actuelle et ce que prévoit le droit local alsacien-mosellan au sujet de la gestion des réfugiés.
La crèche de Noël à Bethléem, c’est la naissance d’un enfant de réfugiés dans un abri de fortune. Un enfant qui apporte pourtant au monde une nouveauté radicale.
Aujourd’hui, loin des marchés de Noël, les «crèches» avec des enfants de réfugiés dormant dans des abris de fortune se multiplient chez nous. Le discours à l’égard de ces étrangers qui nous gâchent le réveillon devient de plus en plus dur et hostile tandis que les autorités et les partis développent des arguments polémiques et populistes. La gestion des réfugiés est une question d’une abominable complexité où se mêlent principes humanitaires, problèmes pratiques, exploitation politique, menées criminelles de réseaux de passeurs, dévouement admirable des uns, égoïsme à courte vue des autres, bonne foi, naïveté et hypocrisie.
Notre identité, c’est aussi une tradition de compassion et d’accueil
Le problème est insoluble, mais il nous revient de tenter de le gérer le moins mal possible dans une région où l’on prône l’humanisme rhénan et dans une ville qui se dit capitale de Noël. Nous ne voulons pas trancher la question des autorités responsables ni des imprévoyances commises. Mais rappelons que le droit local alsacien-mosellan impose aux collectivités publiques de venir au secours des «indigents» sans condition préalable. Il faut d’abord aider, ensuite déterminer les responsabilités. Alors que les Polonais, bien moins riches que nous, et bien moins tonitruants au niveau des grands principes, ont accueilli trois millions de réfugiés, nous serions incapables d’en gérer quelques centaines? Certes, nous ne pouvons pas remédier à toute la misère du monde, mais ce n’est pas vrai que notre région opulente soit au bout de ses capacités et que nous ne pouvons pas faire mieux. Notre Strasbourg, notre Alsace, notre pays sont capables d’en faire davantage et de gérer ces malheureux de façon plus humaine. En fait, la politique de gestion des réfugiés de notre pays est limpide : les traiter suffisamment mal pour qu’ils soient découragés de venir. Ni Strasbourg, ni l’Alsace ni la France ne peuvent se résigner à cette hypocrisie. Nous avons l’habitude dans ces colonnes de nous interroger sur l’identité de l’Alsace. Nous n’hésitons pas à le dire: comme élément constitutif de cette identité, à la suite d’Albert Schweitzer, en mémoire de ces générations d’apatrides et de déracinés qui ont foulé notre sol, en souvenir de l’accueil en 1939 des réfugiés Alsaciens dans le sud-ouest, nous voulons que notre identité ce soit aussi une tradition de compassion et d’accueil.
Quelle hospitalité alsacienne pour aujourd’hui et demain?
Jean-Marie Woehrling